mardi 11 octobre 2016

P'tain, on est au bord du gouffre ! Il serait peut-être temps d'avancer !

On parle souvent de la condition des auteurs, de la paupérisation du métier... On fait des bilans, des analyses et tutti mais on oublie bien souvent de parler des solutions. Ô bien sûr, pas de LA solution qui va faire qu'on va tous vivre de notre plume (pinceau, stylo, stylet, clavier) mais des petites choses que l'on pourrait appelé « des avancées »...

Auteur de BD, ce n'est pas à un vrai métier. Faut juste voir la tête du type derrière le guichet de l'administration ou de la banque pour s'en rendre compte. Nous sommes nulle part. SAUF si notre cher gouvernement demandait à l'INSEE de nous créer un code rien qu'à nous. Du coup, on n'aurait plus à choisir entre la case « autre » ou celle de « artiste peintre », « indépendant », « écrivain ». Non, un petit numéro à l'INSEE et on apparaît au grand jour pour tout le monde. Cela ne coûte rien et ne rapporte rien. Sauf un changement dans les mentalités.


L'un des problèmes, c'est que nous sommes pas intermittents. Nous n'avons pas le droit à une phase de gestation de projet entre deux bouquins. Il nous faut enchaîner les titres rapido. Nous n'avons pas plus le droit au chômage (je sais, on cotise pas...) SAUF si l'on créé une caisse d'aide spécifique. Bon, le plus dur sera sans doute de trouver les critères d’attribution car en ce qui concerne la façon de trouver l'argent de cette caisse, il y a deux pistes : Celle déjà maintes fois évoqué, ne serait-ce que par Victor Hugo, qui consisterait à taxé les livres tombés dans le domaine public (à la place des 8% de droits d'auteurs, on prends ces 8% pour la caisse d'aide aux auteurs). Les morts payeraient pour les vivants. La seconde solution étant un dérivé de la première, on impose 50 centimes sur les bouquins libres de droits (voir sur tous les livres). On pourrait même se dire que taxés les ayants droits de 1 ou 2 % ne serait pas bien grave (je suis déjà d'accord pour que mes enfants se fassent taxer quand je serai mort).

L'argent étant le nerf de la guerre, on pourrait aussi imaginer que les bourses du CNL soient entièrement revues (ou on pourrait en rajouter). Dans mon idées, elles seraient bien plus nombreuses.
- Mais Antoine, tu n'y penses pas, ça va coûter un max.
- Que nenni ! En fait, on s'inspire de ce qui se fait dans certains cas pour le cinéma. Les bourses deviennent remboursables. Si tu vends juste tes 1000 ou 2000 ex, tu es exempté de remboursement. Si tu arrives jusqu'à 12 000 ex, tu commences à rembourser. Si tu passes la barre des 35 000 ex, tu rembourses le double (chiffres à affiner mais dans l'esprit, si ça cartonne, tu n'avais pas besoin d'aide. Sinon, oui).

Et si on allait plus loin ?
Par exemple, pour la fameuse réforme RAAP, on pourrait (légalement) refuser l'organisme actuel. Faire un recours collectif demandant à choisir notre organisme. On ne peut refuser de payer le régime de retraite complémentaire en revanche, si tous les auteurs refusent l'organisme, on pourra sans doute choisir et mettre en concurrence les organismes. Et devinez quoi ? Je suis certain qu'avec la mise en concurrence, on n'aura pas forcément les 8% (choisis arbitrairement par l'organisme actuel).

Allez, puisque je suis chaud, je continue avec un truc où je sens que je vais me faire des amis : avec l'ouverture du marché de l'art à la BD, revient sur le tapis l'idée de donner un pourcentage des ventes d'originaux aux scénaristes. Pourquoi ? Parce que, comme le dit Jean Van Hamme, Vance ne vendant pas le même prix ses pages de Bruce J. Hawker que ses pages de XIII, on voit bien que les originaux sont liés à une histoire bien déterminée. A ceux qui m'opposeraient le fait que le scénariste ne paye pas le papier et l'encre, je répondrais que le dessinateur ne paye pas l'ordinateur et les livres que j'utilise pour ma documentation.
Bon, comme je sais que ça pose problème, on peut aussi se dire l'adaptation cinématographique n'est qu'une adaptation du scénario et que du coup, le dessinateur garde la vente des originaux et le scénariste la vente de l'adaptation ciné (je sais, quand on voit ce que devient Boule et Bill au ciné, on se demande si le scénario est vraiment adapté...). Bref, tout ça pour dire, qu'un peu d'équité (ou de cohésion de groupe) serait le bienvenu.
J'ajoute que pour ma part, je ne demande actuellement qu'une page ou deux aux dessinateurs avec qui je bosse. Pas pour les vendre mais par désir de garder près de moi des moments chers à mes yeux. Bon après, je garde aussi une liste des mecs qui ont joué le jeux !

Et pour nos amis éditeurs ? J'ai aussi des propositions pour améliorer nos rapports :
D'abord, je suis super partisan de la lecture à l'aveugle des dossiers éditeurs. J'entends par là la lecture du dossier sans savoir qui a écrit l'histoire. Exit le coté « hey, ce type est un bon vendeur, je vis lui signer ce nouvel album même si c'est de la merde en barre ». Là, on ne jugerait que sur le contenu. Rien que sur le contenu. Impossible ? Bah non, dans les années 70-80, un éditeur, Eric Losfeld, le faisait. Et vous savez quoi ? Bizarrement, ça faisait des putains de bouquins (je parle ici de romans, même s'il fut aussi un très bon éditeur de BD).

Ensuite, j'aimerais bien que mes amis éditeurs arrêtent de m'envoyer leurs contrats types (mais toujours négociables) alors que ça fait plusieurs bouquins qu'on fait ensemble. Sauf étourderies de ma part, si j'ai refusé une fois une close, ça m'étonnerais que je l'accepte la fois suivante. Bien sûr, il y a là un petit jeu. Mais je trouve que cela fragilise le respect mutuel.
De même, je préconise que l'on aille vers des rapports plus cordiaux et qu'on tente de supprimer toutes les tensions. Pour cela, il serait vraiment bon que l'auteur puisse se rendre au calage ou, du moins, signe le BAT. L'auteur aurait un livre qui lui convient le mieux et l'éditeur aurait un auteur plus satisfait. Bref, ça serait bien qu'on devienne vraiment partenaires (c'est pour ça que je ne vais pas faire de propositions sur comment gérer mieux la relation avec les auteurs ou comment faire du marketing différemment... C'est pas vraiment le sujet du jour).

Bon, ceci n'est que le début des propositions. Si quelqu'un passe par ici et voit un manque, qu'il me le dise (un petit mail, un mp... un pigeon voyageur). Je m'en ferai écho. Car le but est d'avancer. Et ça, ça sera possible que si on se bouge tous (Auteurs, éditeurs, libraires...).

Toutes ces propositions ne sont pas si difficiles à mettre en place. Elles manquent souvent que d'une décision politique.

La bise et vive la bande dessinée (merci à mes copains:collègues de parcours, qu'ils soient dessinateurs, scénaristes, coloristes, directeurs de collection, maquettistes, attachés de presse ou agents d'auteurs).


2 commentaires:

  1. Plein de bonnes là dedans. Bravo.

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  2. Supers propals. Pour les planches je suis d'accord, mais dans un ratio 30/60. Ayant les deux casquettes, je sais que le temps passé sur les planches par le dessineux est quand même plus long que le scénariste, quelque soit le temps passé à écrire, ou à se documenter. Si on raisonne en termes de paternité/maternité, c'est clairement en la défaveur du dessineux. Pour le pourcentage à verser, tu ne le verras jamais si tu laisse les dessineux le faire. Prends tes planches, et vends les de ton côté, au prix que tu veux, c'est mieux. Mes deux cents. Je pense qu'il faudra aussi revoir la condition/statut des coloristes, qui ne sont pas aussi interchangeables que ce que certains collègues veulent bien faire croire. Ils ne créent pas le bouquin au sens de l'histoire, mais ils participent clairement du coup de cœur du public qui perçoit la couleur, avant le trait, bien souvent, et avant même de connaître l'histoire. Donc l'acte d'achat d'un tome 1, c'est dû au dessinateur et au coloriste, avant tout. Les coloristes doivent donc avoir cette reconnaissance, sur les couvertures, et de façon systématique, et sur le terme "auteur" au minimum, avec le petit pourcentage que cela sous entends. Mes deux cents, et encore bravo pour les bonnes idées.

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